Actualité patrimoniale LBF – Décembre 2024
Avant d’allumer les lumières du sapin, les ingénieurs patrimoniaux de LBF partagent leur dernière revue d’actualité de 2024. Les sujets retenus mettent en avant le lourd prix à payer pour les particuliers mal conseillés : la requalification d’une vente ou l’invalidité d’une renonciation. On examine également des questions qui se posent aux couples : les abattements fiscaux sur cession de titres et les legs au partenaire de PACS. Enfin, on passe en revue les nombreuses récentes consolidations dans la gestion de patrimoine.
Bonne lecture et joyeuses fêtes !
A la veille des fêtes de fin d’année, la course pour la tête du secteur de la gestion de patrimoine s’emballe avec une surenchère d’ultimes annonces de consolidations. Le travail ne manquera pas pour les nouvelles entités. En effet, si l’on en juge par les sujets analysés par les ingénieurs patrimoniaux de LaBienveillanceFinancière, le besoin de conseil et d’accompagnement est plus grand que jamais.
Bonne lecture, et joyeuses fêtes !
- Requalification en donation d’une vente intrafamiliale
- Un héritier face à la rigueur des délais légaux d’acceptation ou de renoncement à un héritage
- Abattement fiscal sur les cessions de titres de PME au sein d’un foyer fiscal
- Réduction des legs en usufruit consentis au partenaire de PACS
- Consolidations : La course pour la tête du secteur de la gestion de patrimoine
Requalification en donation d’une vente intrafamiliale
La vente intrafamiliale de la nue-propriété d’un bien immobilier est une option envisageable pour garder un bien dans la famille tout en permettant au vendeur de toucher les liquidités de la vente et de garder l’usage du bien.
Attention toutefois à estimer le bien à sa juste valeur. Comme une récente affaire le prouve, l’administration fiscale sera très vigilante. Elle pourra voir un prix trop bas comme une tentative d’échapper aux droits de transmission.
Dans cette affaire, madame X. a vendu à la Société Civile Immobilière (SCI) Z. pour 1 190 000 € la nue-propriété d’une villa et de ses dépendances situées sur un vaste terrain dans le Var.
Un bien sous-estimé
L’administration fiscale a estimé que la valeur vénale déclarée était sous-estimée. En effet, de son côté, elle a retenu comme valeur de l’ensemble immobilier 3 832 950 € pour la pleine propriété et 2 683 065 € pour la nue-propriété. La valeur portée dans l’acte notarié représentait donc à ses yeux une minoration de 1 493 065 €, soit 55 %.
Une donation déguisée en vente
De plus, prenant en compte l’âge avancé de Mme X. soit 80 ans au moment de la transmission, le fait que M. Y., son fils unique, était gérant majoritaire de la SCI Z. dont il détient 996 des 1000 parts, et enfin le fait que Mme X. avait déjà fait à ce fils la donation d’un terrain voisin, l’administration a considéré que la vente était en réalité une donation déguisée avec charge et qu’elle visait à contourner les droits de mutation à titre gratuit (DTMG).
Une taxation punitive
En conséquence, l’administration a appliqué la taxation suivante :
- DTMG au taux de 60 %, soit le taux applicable aux donations à une société civile, appliqué à la valeur vénale corrigée.
- Majorés de 80 % pour abus de droit.
Dans ce contexte, les contribuables ont saisi le Comité d’abus de droit fiscal. Celui-ci a rejeté, faute d’éléments probants, leur contestation des termes de comparaison utilisés par l’administration pour évaluer le bien immobilier.
Cette affaire démontre, s’il le fallait encore, l’exigence de l’administration fiscale concernant l’estimation de valeur vénale des biens immobiliers et la nécessité de soigneusement la documenter. Elle nous rappelle également la rigueur de l’administration fiscale face aux montages familiaux hasardeux impliquant des sociétés civiles. Enfin, elle souligne la sévérité des sanctions destinées à dissuader les abus.
Source : DGFiP avis rendu par le comité de l’abus de droit fiscal 26 septembre 2024
Un héritier face à la rigueur des délais légaux d’acceptation ou de renoncement à un héritage
Après un décès, les héritiers font face à un choix crucial. Ils doivent décider s’ils acceptent purement et simplement la succession, s’ils l’acceptent seulement à concurrence de l’actif net, ou s’ils y renoncent.
Ce choix doit être exprimé dans les quatre mois suivant l’ouverture de la succession. Passé ce délai, un créancier peut les contraindre à prendre une décision. Ils disposent alors de deux mois supplémentaires pour se prononcer.
La Cour administrative d’appel de Versailles a récemment tranché une affaire complexe illustrant les implications fiscales et patrimoniales des successions mal gérées sur ce point.
Dans cette affaire, monsieur B., héritier de son père décédé en janvier 2018, s’est vu réclamer des dettes fiscales totalisant plus de 2 millions d’euros. Face à ces créances, monsieur B. avait dans un premier temps, en décembre 2018, accepté la succession à concurrence de l’actif net. Puis, en avril 2019, il y avait renoncé.
Une démarche de renoncement hors délai revient à une acceptation irrévocable
Or, le fisc a contesté la validité de ces démarches. Il a souligné qu’une sommation de prendre parti avait été adressée à monsieur B. en juin 2018 et que, faute de réponse dans les deux mois, il était réputé avoir accepté la succession de manière pure et simple.
En effet, la Cour a confirmé que :
- Conformément à l’article 772 du Code civil, l’absence de réponse à une sommation dans les délais impartis entraîne une acceptation tacite et irrévocable de la succession.
- L’acceptation pure et simple, rétroactive à la date d’ouverture de la succession (article 776), rend l’héritier solidairement responsable de l’intégralité du passif successoral, y compris des dettes fiscales.
- Monsieur B. ne pouvait, après cette acceptation, ni limiter sa responsabilité à l’actif net ni renoncer à la succession.
Une leçon très cher payée
Ce jugement nous rappelle combien négliger les délais peut entraîner de conséquences financières désastreuses. Dure leçon pour monsieur B. Il aurait été mieux loti s’il avait pu profiter d’un accompagnement rigoureux qui l’aurait aidé à planifier toutes ses échéances.
Source : Cour d’appel administrative de VERSAILLES, 3ème chambre, 19/09/2024
Abattement fiscal sur les cessions de titres de PME au sein d’un foyer fiscal
Récemment, l’administration fiscale a apporté une précision importante concernant les abattements fiscaux en cas de cession de titres par un couple.
Le BOI-RES-RPPM-000135 précise la position de l’administration fiscale concernant deux types d’abattements :
L’abattement pour départ en retraite
Si les époux ou partenaires sont des dirigeants partant à la retraite qui remplissent chacun pris isolément l’ensemble des conditions relatives à la cession de titres de petite ou moyenne entreprise (PME) européenne prévues à l’article 150-0 D ter du Code général des impôts (CGI) à l’exception de la condition tenant au seuil de détention des parts de 25 %, ils sont susceptibles de bénéficier chacun de l’abattement fixe de 500 000 euros sur la plus-value de cession. En revanche, le reliquat non utilisé par l’un ne peut pas être reporté et imputé sur la plus-value réalisée par l’autre.
L’abattement pour durée de détention
Si le foyer fiscal a opté pour l’imposition des plus-values mobilières selon le barème progressif de l’impôt sur le revenu, les conditions d’application d’un abattement proportionnel pour durée de détention, de droit commun ou renforcé, prévu respectivement au 1 ter ou au 1 quater de l’article 150-0 D du CGI pour les titres acquis avant 2018, s’apprécient également au niveau de chaque cédant considéré isolément.
Chaque cédant est traité individuellement pour le bénéfice des abattements
Enfin, lorsque chacun des deux membres d’un foyer fiscal cède les titres qu’ils détiennent dans une même société, le fait que l’un bénéficie de l’abattement pour départ à la retraite sur la plus-value qu’il a réalisée, ne prive pas l’autre de l’abattement de droit commun ou renforcé pour durée de détention sur la plus-value réalisée à raison de la cession de ses propres titres.
Chaque cédant, bien que faisant l’objet de l’imposition commune du foyer, est ainsi traité individuellement en ce qui concerne le bénéfice d’abattements fiscaux distincts.
Ce rescrit vient lever une incertitude et offrir une meilleure visibilité et plus d’équité aux contribuables dans le cadre des cessions de titres par un couple.
Réduction des legs en usufruit consentis au partenaire de PACS
Contrairement aux conjoints mariés, les partenaires de PACS ne sont pas automatiquement considérés comme héritiers l’un de l’autre. Ils ne peuvent donc être gratifiés à la succession qu’à travers un legs, nécessitant la rédaction préalable d’un testament.
Cette inégalité se reflète également dans le droit au logement après le décès : alors que le conjoint survivant d’un couple marié bénéficie d’un droit viager au logement, le partenaire de PACS ne dispose que d’un droit temporaire d’un an.
Pour se protéger mutuellement, certains couples PACSés choisissent de léguer l’usufruit de leur résidence principale, au partenaire survivant. Cela a permettra à ce dernier de continuer à vivre dans le logement, tout en garantissant aux héritiers, souvent les enfants, de récupérer le bien à son décès.
Le legs de nue-propriété face à la réserve héréditaire
Cependant, la mise en œuvre de cette protection rencontre des obstacles juridiques et pratiques liés aux particularités du droit successoral français :
- Tout d’abord, comme tout legs, le legs au partenaire de PACS doit respecter la réserve héréditaire. Le partenaire de PACS ne peut donc recevoir qu’un legs limité à la quotité disponible ordinaire, soit une fraction de la succession (un quart, un tiers ou la moitié) qui dépend du nombre d’enfants, héritiers réservataires.
- De plus, pour calculer l’atteinte à la réserve héréditaire, la valeur imputée sur cette quotité disponible ordinaire est celle du bien en pleine propriété, et non la seule valeur de l’usufruit légué. Cette règle augmente le risque de dépassement de la quotité disponible, exposant ainsi le partenaire survivant à des contestations et à des demandes de réduction de la part des héritiers réservataires.
L’article 917 à la rescousse
Dans le but de respecter la volonté du testateur et de simplifier la gestion des successions en évitant des évaluations complexes, l’article 917 du Code civil introduit une règle particulière concernant la réduction des legs en usufruit ou en rente viagère qui dépassent la quotité disponible, sous réserve qu’aucune autre libéralité n’ait été accordée au légataire. Dans ce cas, les héritiers réservataires ont le choix entre deux options :
- Exécuter le legs intégralement, y compris la partie excessive, ou
- Abandonner la pleine propriété de la quotité disponible ordinaire (réduction) en pleine, ce qui peut entraîner une indivision entre le légataire et les héritiers.
Lorsque cet article n’est pas applicable ou que le testateur en a exclu l’application, la réduction s’effectuera en valeur. Une indemnité compensatoire sera alors versée aux héritiers réservataires, ce qui peut amener à une évaluation économique complexe de la valeur de l’usufruit.
On voit ici l’importance pour les couples PACSés, toujours plus nombreux, de recourir à une planification successorale précise et adaptée à leur situation afin de limiter les risques de conflits et d’optimiser la protection du conjoint survivant.
Référence : Article 917 du Code civil
Ultimes consolidations dans la course en tête du secteur de la gestion de patrimoine
La gestion de patrimoine est un secteur très attractif pour le capital-investissement. En effet, les fonds veulent saisir l’occasion de financer la consolidation de ce marché encore très fragmenté et en croissance. Ils ciblent en particulier les entreprises du secteur qui font la course en tête.
Une course exacerbée pour la tête du secteur
Voici les derniers épisodes de cette course exacerbée depuis la rentrée d’automne :
Fort de son nouvel actionnaire Goldman Sachs Private Equity, le groupe Crystal a annoncé le 10 décembre l’acquisition du groupe Corelliance qui comprend trois cabinets dans la région PACA représentant au total 250 millions d’euros d’encours. Crystal renforce ainsi sa position en tête du secteur avec 23 milliards d’euros d’encours conseillés.
Aussitôt la nouvelle tombée, le numéro 2, Cyrus Herez, a annoncé le 11 décembre l’acquisition de Médicia Gestion Privée, un CGP franc comtois. Le groupe Cyrus Herez revendique maintenant plus de 18 milliards d’euros d’encours ! La course au sommet ne faiblit pas.
Dès le lendemain, 12 décembre, le pôle gestion privé de Crystal, Laplace annonçait le rachat d’Armonial Partners, un cabinet montpellierain spécialisé dans les cessions d’entreprises. Il s’agit de la 31e opération de croissance externe de Crystal.
Le numéro 3, le Groupe Premium a, quant à lui, conclu en octobre l’acquisition du multi family office parisien Agami Family Office (1,5 milliard d’euros d’encours). Cette acquisition suit de peu celle du cabinet Haenggi & Associés de la région du Grand Est. Grâce à cette croissance externe, le Groupe Premium affiche maintenant 13 milliards d’euros d’encours sous conseil.
Le peloton n’est pas en reste
Dans le peloton aussi, les consolidations vont bon train. Le fonds SEVEN2 devient actionnaire majoritaire du groupe Olifan Group (plus de 2 milliards d’euros d’actifs conseillés). Ce soutien financier permettra à Olifan Group de poursuivre sa stratégie de croissance externe illustrée en septembre par l’acquisition de trois cabinets en Occitanie : Arak Finance, Delattre finance, et Divitiae.
Enfin, le courtier digital en assurance pour les TPE et PME Simplis rachète son concurrent Stello. Fondé en 2017, Simplis compte sur sa plateforme technologique agile pour créer un leader du courtage à destination de la clientèle pro.
Sources : L’Agefi, Citywire, L’Usine Digitale, Fusac
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