Actualité patrimoniale LBF – Novembre 2025

Actualité patrimoniale LBF – Novembre 2025

Alors que la fin d’année approche et que les évolutions législatives s’accélèrent, l’actualité patrimoniale révèle un paysage en pleine transformation. Entre vigilance accrue sur les donations de dernière minute, généralisation de la dématérialisation des déclarations, encadrement inédit des frais bancaires liés aux successions et rappel des limites fiscales du PACS, les ingénieurs patrimoniaux de LaBienveillanceFinancière constatent une tendance claire : jamais le besoin d’analyse, de pédagogie et de conseil structuré n’a été aussi essentiel pour sécuriser les stratégies des familles.
Bonnes lectures et joyeuses fêtes !


12 minutes de lecture

À l’approche de la fin d’année, l’actualité patrimoniale s’accélère : donations, dématérialisation, frais successoraux et PACS scrutés renforcent l’importance d’un conseil expert pour sécuriser les stratégies familiales. En effet, si l’on en juge par les sujets analysés par les ingénieurs patrimoniaux de LaBienveillanceFinancière, le besoin de conseil et d’accompagnement est plus grand que jamais.

Bonne lecture et joyeuses fêtes !

Donations de « dernière minute » : toutes ne sont pas fictives

Les donations conclues peu de temps avant le décès du disposant attirent l’attention de l’administration fiscale. La proximité des dates, un état de santé fragile ou une réorganisation rapide du patrimoine alimentent le soupçon de libéralité à cause de mort. L’objectif supposé consiste à alléger les droits de succession. Un jugement récent du tribunal judiciaire de Paris rappelle cependant qu’une donation de « dernière minute » n’est pas fictive par principe. Elle reste valable lorsqu’elle s’intègre dans une véritable stratégie patrimoniale entre vifs.

L’affaire porte sur une transmission de parts sociales réalisée quelques jours avant le décès. Elle intervient après la vente d’un bien immobilier important. Le produit de cette vente est réinvesti dans une structure sociétaire. Cette organisation vise à protéger le conjoint et à anticiper la transmission aux enfants. Dans ce cadre, le disposant consent une donation de parts très peu de temps avant sa disparition. Lors du contrôle de la succession, l’administration demande la réintégration de cette donation dans l’actif successoral. Elle insiste sur la proximité entre l’acte et le décès, ainsi que sur l’enchaînement d’opérations au profit des proches. Elle souligne aussi un état de santé qu’elle considère très altéré. Pour elle, l’opération relève d’une logique de fin de vie et doit être traitée comme une libéralité à cause de mort.

Analyse du projet patrimonial par le tribunal

Les juges adoptent une autre approche. Ils examinent d’abord la chronologie réelle du projet. Le dossier montre que la réflexion sur la vente du bien commence bien avant le décès. Il révèle aussi que la réorganisation du patrimoine s’engage au même moment. La création de la structure civile suit cette dynamique. Les échanges avec le notaire, plusieurs mois avant la signature, évoquent déjà une donation de parts. L’acte contesté apparaît ainsi comme l’aboutissement d’un projet longuement préparé, et non comme une réaction à une fin de vie imminente.

Apport de l’analyse médicale

L’analyse médicale confirme cette lecture. Le défunt souffre de pathologies chroniques fréquentes à son âge. Toutefois, aucun élément ne permet de prévoir un décès rapide au moment de la donation. La mort résulte d’un événement accidentel, sans lien avec une évolution terminale de la maladie. Les témoignages décrivent d’ailleurs une personne menant une vie relativement ordinaire. Dans ces conditions, il devient difficile de considérer que l’acte vise uniquement à anticiper un décès annoncé. Il matérialise plutôt une véritable libéralité entre vifs.

La décision éclaire plus largement la manière dont les juridictions abordent ces situations. La proximité des dates constitue un indice, mais elle reste insuffisante. Les juges recherchent surtout une cohérence d’ensemble : un projet patrimonial structuré, des objectifs non exclusivement fiscaux, la protection du conjoint, l’égalisation entre héritiers et l’absence de pronostic vital engagé.

La portée de la décision

Lorsque ces éléments se retrouvent, la qualification de donation entre vifs résiste plus facilement aux contestations. En filigrane, le jugement rappelle qu’une donation signée à la veille du décès ne devient pas fictive par sa seule date. La frontière entre donation entre vifs et libéralité à cause de mort dépend surtout de la réalité du projet et de sa traçabilité.

Pour les praticiens, la solution la plus sûre repose sur une stratégie anticipée, assumée et soigneusement documentée.

Source : Tribunal Judiciaire de Paris, 9e chambre 2e section, 4 novembre 2025, n°24/06880

Dons manuels et dons de sommes d’argent : la dématérialisation devient la règle au 1er janvier 2026.

À partir du 1er janvier 2026, les contribuables devront en principe déclarer en ligne les dons manuels (CGI art. 635 A) et les dons familiaux de sommes d’argent exonérés (CGI art. 790 G, IV), puis régler les droits par télépaiement. Jusqu’au 31 décembre 2025, ils peuvent encore choisir entre la télédéclaration, qui reste facultative, et le dépôt du formulaire papier n° 2735. Le décret n° 2025-1082 du 17 novembre 2025, pris sur le fondement de la loi de finances pour 2020, fixe désormais clairement ce nouveau cadre et met fin aux hésitations réglementaires antérieures.

Cette obligation de dématérialisation ne couvre cependant pas toutes les situations. Elle ne s’applique pas aux déclarations relevant de régimes spécifiques. Le dispositif exclut notamment celles liées au pacte Dutreil-transmission ou aux dons avec droits payés à l’étranger. Les dons finançant l’acquisition ou la rénovation énergétique de la résidence principale ne sont également pas concernés.
Certains dons réalisés au profit de l’État, ou bénéficiant de réductions de droits, échappent aussi à l’obligation. Les rappels de dons déjà déclarés sur support papier demeurent en dehors du champ du texte. Les dons effectués au profit de personnes morales ne sont pas soumis à cette règle. Enfin, plusieurs situations particulières touchant les mineurs ou les majeurs protégés restent exclues. Les personnes physiques dépourvues d’accès à internet dans leur résidence principale, ou affirmant ne pas pouvoir utiliser la procédure électronique, bénéficient également d’une dispense.

En pratique, la téléprocédure devient le mode habituel de déclaration et de paiement pour la plupart des dons manuels et familiaux. La voie papier subsiste uniquement pour les cas d’exception ou les situations bénéficiant d’une dispense.

Source : Décret 2025-1082 du 17-11-2025

Succession : les frais bancaires enfin encadrés par la loi

Pendant des années, les banques facturaient aux héritiers de leurs clients décédés des frais de succession. Ces frais manquaient jusqu’ici de cadre légal. Chaque établissement fixait ses propres tarifs, ce qui provoquait de fortes disparités de prix et une véritable inégalité entre les clients. Pour y mettre fin, une nouvelle réglementation est entrée en vigueur le 13 novembre 2025.

Ce qui change

La loi n° 2025-415 du 13 mai 2025 introduit l’article L. 312-1-4-1 dans le Code monétaire et financier. Elle vise à limiter et à encadrer les frais bancaires facturés lors du règlement d’une succession.

La loi énumère clairement les situations dans lesquelles les banques ne peuvent plus prélever de frais. Désormais, plusieurs cas ouvrent droit à la gratuité totale des opérations indispensables au règlement d’une succession portant sur un compte courant ou un livret :

  • Lorsque le défunt était mineur : le titulaire décédé avait moins de 18 ans, et la gratuité s’applique automatiquement, quel que soit le montant présent sur les comptes.
  • Lorsque la succession est modeste : l’ensemble des comptes du défunt représente moins de 5 910 € ; dans ce cas, aucune facturation n’est autorisée. Ce seuil fait l’objet d’une réévaluation régulière.
  • Lorsque la succession est simple : l’héritier démontre sa qualité (acte de notoriété ou attestation signée par l’ensemble des héritiers) et la succession ne présente aucune complexité particulière définie par le décret d’application.

Quand considère-t-on qu’une succession est “complexe” ?

Le décret n° 2025-813 du 13 août 2025 précise les situations dans lesquelles la banque peut considérer qu’un traitement particulier est nécessaire pour les opérations réalisées sur les comptes courants ou les livrets. Les opérations deviennent complexes dans les cas suivants :

  • absence d’héritiers en ligne directe descendante ;
  • présence d’un prêt immobilier en cours ;
  • existence de comptes professionnels à clôturer ;
  • présence de garanties ou de sûretés sur les comptes ou produits d’épargne à clôturer ;
  • existence d’un élément d’extranéité (résidence à l’étranger, loi étrangère applicable, etc.).

Produits expressément exclus de la gratuité

Certains placements ne bénéficient pas de l’exonération, notamment les PEA, PEA-PME, comptes PME innovation, plans d’épargne avenir climat et autres produits d’épargne soumis à un régime fiscal spécifique.

Des frais désormais plafonnés

Pour les produits qui ne relèvent pas de la gratuité, les banques doivent respecter deux limites cumulatives :

  • un maximum de 1 % du total des avoirs concernés ;
  • jamais plus de 850 €.

Ce plafond annuel de 850 € fait l’objet d’une revalorisation automatique en fonction de l’inflation.

En résumé

La loi du 13 novembre 2025 encadre strictement les frais bancaires liés aux successions. Elle apporte ainsi transparence et sécurité aux héritiers. Elle limite fortement les coûts dans les situations les plus simples et renforce la protection des consommateurs face aux pratiques bancaires. Cette réforme, bien qu’essentielle, soulève toutefois une question majeure : comment les banques appliqueront-elles concrètement ces plafonds et exemptions, et faudra-t-il à l’avenir élargir le dispositif à d’autres produits ou à des situations complexes encore non couvertes par la loi ou le décret d’application ?

Sources :

Loi n°2025-415 du 13 mai 2025 visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession

Décret n°2025-813 du 12 août 2025 d’application de la loi n°2025-415 du 13 mai 2025 visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession.

Vie commune ou stratégie fiscale ? Les limites d’un PACS

La conclusion d’un PACS peut entraîner des conséquences fiscales importantes, notamment en matière de droits de succession. L’affaire examinée le 11 septembre 2025 par le Comité de l’abus de droit fiscal montre clairement les risques encourus lorsqu’un PACS sert principalement à obtenir un avantage fiscal.

Le cas

En 2019, une personne âgée et lourdement handicapée a conclu un PACS avec son assistant de vie et l’a désigné légataire universel de tout son patrimoine. À son décès en 2021, le partenaire survivant a hérité de l’ensemble des biens et a profité de l’exonération des droits de succession accordée aux partenaires liés par un PACS.

L’administration fiscale a contrôlé les déclarations de revenus et de succession, estimant que le PACS était fictif. Selon elle, les partenaires avaient conclu ce pacte essentiellement pour bénéficier d’un avantage fiscal, alors qu’ils ne vivaient pas ensemble et que le partenaire survivant continuait de percevoir la rémunération liée à ses fonctions d’assistant de vie. L’administration a donc adressé une proposition de rectification, a réclamé les droits de succession avec intérêts et a appliqué une majoration de 80 % pour abus de droit.

Le Comité de l’abus de droit a confirmé cette analyse. Il a constaté l’absence de vie commune pourtant exigée pour un PACS, l’incapacité du partenaire survivant à démontrer que ses interventions dépassaient ses obligations professionnelles, et le caractère fictif du PACS. Le Comité a jugé que le partenaire survivant était le principal bénéficiaire de l’opération et que la majoration appliquée par l’administration était justifiée.

Conclusion

Cette affaire rappelle aux professionnels du patrimoine que la réalité de la vie commune et la sincérité des démarches fiscales demeurent essentielles. Un PACS conclu principalement pour obtenir un avantage fiscal peut être requalifié en abus de droit, et la sanction qui en découle peut être pleinement validée.

Source : CADF n°9/2025, 11 sept. 2025, aff. n° 2025-12 et n°2025-13

Sema AYNE et Marie HANNIN, ingénieures patrimoniales à LaBienveillanceFinancière, ont préparé cette revue de l’actualité patrimoniale.

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