Les risques de l’occupation gratuite d’un bien par son nu-propriétaire

Les risques de l’occupation gratuite d’un bien par son nu-propriétaire

Bien qu’il s’agisse d’une situation répandue, l’occupation gratuite d’un bien démembré par le nu-propriétaire n’est pas sans risques. LaBienveillanceFinancière vous informe sur ces risques et les moyens de les prévenir.


5 minutes de lecture

Il peut arriver qu’un enfant occupe gratuitement un bien dont l’usufruit est détenu par son parent ou grand-parent qui lui en ont donné la nue-propriété. D’après nos observations basées sur plus de 10 000 dossiers, cette situation est assez fréquente. Elle peut paraître anodine. Pourtant, en l’absence de cadre juridique, elle peut avoir des conséquences fiscales importantes et engendrer des litiges lors du règlement de la succession.

Cet article présente ces risques et les solutions pour les prévenir.

Les conséquences civiles et fiscales d’une situation non formalisée

Pour rappel, dans le cadre d’un démembrement de propriété, l’usage du bien démembré revient exclusivement à l’usufruitier. Le nu-propriétaire, quant à lui, a vocation à devenir plein propriétaire au terme de l’usufruit.

Si le nu-propriétaire occupe un bien démembré sans contrepartie, il bénéficie alors d’un droit qui ne lui appartient pas encore.

La jouissance gratuite d’un bien par un nu-propriétaire peut être requalifiée en donation indirecte si deux conditions sont réunies :

  • Un appauvrissement de l’usufruitier,
  • Une volonté de gratifier le nu-propriétaire

Du point de vue civil :

« Tout héritier […] doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt par donation entre vifs directement ou indirectement ». Article 843 du Code civil

Ainsi, si le nu-propriétaire est héritier de l’usufruitier, il devra rapporter à la succession le montant des loyers qu’il aurait dû payer s’il avait loué le bien, après déduction des dépenses d’entretien et de réparation qui incombent à l’usufruitier.

En présence d’héritiers réservataires, ces derniers pourraient, en cas d’atteinte à leur réserve héréditaire, exiger la réduction de la part successorale du bénéficiaire de l’occupation gratuite.

Fiscalement, l’administration fiscale peut requalifier l’occupation gratuite en donation indirecte si elle prouve l’intention libérale de l’usufruiter. Cette qualification entraîne une imposition aux droits de mutation à titre gratuit, droits de donation ou droits de succession, selon les circonstances.

La solution ? Formaliser la situation par un prêt à usage

Pour sécuriser cette situation, il est essentiel de formaliser l’occupation du bien par un commodat, ou prêt à usage, défini comme suit :

 « Un contrat par lequel l’une des parties livre une chose à l’autre pour s’en servir, à la charge par le preneur de la rendre après s’en être servi ». Article 1875 du Code civil.

En d’autres termes, le prêt à usage est un prêt gratuit.

Dans le cas de l’occupation gratuite par un nu-propriétaire, ce prêt gratuit doit impérativement être à durée déterminée. Cependant, aucune durée n’est imposée. L’emprunteur peut donc rendre le bien quand il a fini de s’en servir. En revanche, le prêteur ne peut librement disposer du bien pendant la durée du prêt.

Concrètement, cela signifie que le nu-propriétaire :

  • Peut habiter gratuitement le bien,
  • N’a aucun loyer à verser à l’usufruitier,
  • S’engage à conserver le bien en assumant les dépenses relatives à son entretien,
  • S’engage à le restituer dans un délai déterminé dans l’état où il l’a reçu.

Ainsi, la mise en place d’un prêt à usage permet de clarifier la situation d’occupation gratuite d’un bien par un nu-propriétaire. Bien qu’aucune contrepartie financière ne soit prévue, il ne s’agit pas d’une donation dès lors que le prêt à usage est limité dans le temps et qu’il prévoit la restitution du bien.

Préférer un contrat écrit par un professionnel

Le contrat de commodat peut être un contrat oral par simple échange de consentement entre les parties.

Cependant, pour plus de sécurité juridique, il est fortement recommandé d’en formaliser les conditions par écrit, avec l’aide d’un professionnel. Ceci permettra de prévenir les risques de litige ou de requalification par l’administration fiscale.

Enfin, il est possible d’enregistrer le contrat de commodat au service des impôts ou de le rédiger par un acte notarié pour lui donner date certaine et une force probatoire.

Références : Légifrance Articles 1875 à 1891 du Code civil

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