Actualité Patrimoniale – Mars 2023

Actualité Patrimoniale – Mars 2023

De fortes turbulences ont secoué le monde bancaire en mars 2023. Notre revue de l’actualité patrimoniale de ce mois aborde les « CoCos », les « CumCum » et le problème de la confiance dans les banques, sans pour autant oublier les questions du quotidien de la gestion de patrimoine : les ventes en viager, la fiscalité des cryptomonnaies, le rachat instantané des contrats d’assurance vie, la fiscalité des indemnités des élus, l’IFI, le calendrier des déclarations de revenu.


18 minutes de lecture

Faillites, accusations de fraude, les banques sont prises dans la tourmente. Comment empêcher la crise de confiance ? Dans ce contexte, les ingénieurs patrimoniaux de LaBienveillanceFinancière ont retenu de l’actualité patrimoniale de mars 2023 les questions suivantes :

Comment rassurer les épargnants face au risque de crise bancaire ?

En quelques semaines les banques Silicon Valley Bank (SVB) et de Credit Suisse ont été mises en faillite. Aujourd’hui la Deutsche Bank est en difficulté. Il est naturel que ces évènements inquiètent les épargnants. Que leur répondre s’ils expriment leur crainte d’une nouvelle crise bancaire ?

Nous suggérons les réponses suivantes :

  • Les États sont prêts à intervenir : si les clients perdent confiance, ils retirent leur argent des banques, ce qui les met davantage en difficulté. La « panique bancaire » contamine alors tout le système. Depuis 2008, les États sont prêts à tout pour restaurer la confiance. Ainsi les États américain et suisse ont mis des milliards sur la table pour garantir les dépôts des clients de la SVB et du Credit Suisse.
  • La réglementation européenne prévient les problèmes : La SVB n’était pas soumise aux exigences de solvabilité de la réglementation internationale (Bâle 3) mise en place après la crise de 2008. En effet, le président Trump en avait exclu les petites et moyennes banques. Les banques européennes sont, elles, soumises à cette réglementation. Leur solvabilité est très surveillée.
  • Les banques européennes sont résilientes : Comme tous les secteurs, les banques européennes ont été impactées par la crise sanitaire, la guerre en Ukraine, et leurs conséquences économiques, dont l’inflation. Cependant, ces banques, et en particulier les banques françaises, sont restées profitables et devraient bénéficier à moyen terme de la remontée des taux d’intérêt.  
  • Les fonds des particuliers sont en partie garantis : En cas de faillite d’une banque, les dépôts des particuliers français sont garantis par le Fonds de Garantie des Dépôts et de Résolution jusqu’à 100 000 euros par personne et par établissement, jusqu’à 500 000 euros pour les dépôts temporaires exceptionnels (héritage par ex.) et jusqu’à 70 000 euros pour les titres.

Dans les faits cependant, le principal argument est que les banques en difficulté ne disparaissent pas avec les comptes des clients. Elles sont reprises par des concurrents sans perte pour les clients, comme cela est le cas actuellement pour SVB et Credit Suisse. Les investisseurs dans les valeurs bancaires sont exposés au risque en première ligne.

Qu’est-ce que la fraude au CumCum dont on accuse les banques françaises ?

Le CumCum et son cousin allemand le Cum-Ex sont des montages d’optimisation fiscale qui sont aujourd’hui dénoncées comme frauduleux. Ils consistent à transférer temporairement la propriété d’un titre dont les possesseurs non-résidents sont soumis à la taxation sur les dividendes vers une banque non soumise à cette taxation. Concrètement, le non-résident transfère la propriété avant la perception des dividendes et le récupère ensuite en versant au passage à la banque une partie de l’économie réalisée en éludant la taxe.

Cinq établissements français, BNP Paribas, la Société générale, la société de gestion Exane, Natixis et HSBC sont aujourd’hui soupçonnées d’avoir pratiqué ces montages. Elles sont passibles d’importantes pénalités allant, d’après le Figaro jusqu’à 50% de l’impôt éludé. Les perquisitions menées pourraient avoir des répercussions sur leurs partenaires dans ces opérations.

Des banques allemandes et néerlandaises ont également été mises en accusation pour des faits similaires.

Pourquoi l’annulation des CoCos (obligations AT1) de Credit Suisse pose-t-elle problème ?

Les CoCos sont des obligations AT1, appelée CoCos pour « obligations convertibles contingentes ». Elles ont été créées à la suite de la crise 2008 pour inciter les investisseurs à continuer à investir dans les banques. Ce sont des obligations risquées : leurs échéances de remboursement peuvent être repoussées, elles sont converties automatiquement si les capitaux propres de la banque passent sous un certain seuil et peuvent même être annulées à un seuil encore plus bas.

Minée par des scandales à répétition, la banque Credit Suisse avait perdu 84 % de sa valeur en deux ans. Sa chute s’est encore accélérée en mars avec des pertes et des retraits massifs de clients. Les autorités fédérales suisses sont donc intervenues pour éviter une crise bancaire. Elles ont forcé UBS, l’autre grande banque Suisse, à racheter Credit Suisse à moins de 50 % de sa valeur. Les actionnaires ont donc sauvé une (petite) partie de leur mise.

En revanche, le régulateur Suisse a décidé d’annuler purement et simplement plus de 17 Mrds de $ de CoCos. Ce faisant, il a bouleversé la hiérarchie des créanciers qui veut que les actionnaires soient les derniers à être payés, après les détenteurs d’obligations.

Bien que légalement correcte, cette annulation pose problème car elle mine la confiance des détenteurs d’obligations AT1, en général. Or, celles-ci sont une importante source de capitaux pour de nombreuses banques.

Quelles sont les particularités de l’imposition des gains des particuliers en cryptomonnaies ?

Pendant plusieurs années, les transactions effectuées en cryptomonnaies sont passées sous le radar de la réglementation. Tenant compte de leur adoption croissante par les investisseurs particuliers, et même institutionnels, l’administration fiscale s’est attelée à définir une qualification juridique et une fiscalité adaptées aux particularités de ces nouveaux actifs digitaux. Voici, en clair, l’état actuel de l’imposition des cryptos pour les particuliers.

Depuis le 1er janvier 2023, la fiscalité qui s’applique aux gains occasionnels réalisés par les particuliers sur les cryptomonnaies s’aligne sur celle des actifs financiers. La plus-value est imposée à 30 %, ou au barème progressif de l’impôt sur le revenu sur option. Cependant, deux particularités importantes sont à retenir :

  • l’exonération des échanges intra-crypto,
  • l’imposition des cessions en fonction de la plus-value du portefeuille total.

Échanges intra-crypto exonérés

Rien n’est à déclarer si un particulier n’effectue que des échanges entre cryptomonnaies. Prenons un exemple pour mieux comprendre : si Pierre échange du bitcoin contre du solana puis s’il vend du solana pour acheter des stablecoins (USDC, USDT…), il n’aura rien à déclarer. C’est à partir du moment où il échangera ses cryptomonnaies contre une monnaie classique, à cours légal, qu’il devra établir une déclaration fiscale.

Cessions contre euros imposées en fonction de la plus-value du portefeuille 

La plus-value imposable ne se calcule pas seulement sur la base des prix d’achat et de vente de la cryptomonnaie vendue. Elle est évaluée en prenant en compte la plus-value latente de toutes les cryptomonnaies du portefeuille virtuel.

Voici la lettre de l’article 150H du CGI :

« La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits […] est égale à la différence entre, d’une part, le prix de cession et, d’autre part, le produit du prix total d’acquisition de l’ensemble du portefeuille d’actifs numériques par le quotient du prix de cession sur la valeur globale de ce portefeuille. »

Reprenons l’exemple de Pierre pour voir comment cela s’applique :

Imaginons que Pierre ait acheté 5 000 € de solana et 10 000 € d’éther il y a quelques mois et qu’aujourd’hui, le montant de solana qu’il détient vaut 9 000 €, mais ses éthers ne valent plus que 8 000 €. Si Pierre profite du cours du solana pour vendre cette cryptomonnaie et récupérer le montant de la vente en euros, il sera imposé de la manière suivante

  • Calcul de la plus-value globale du portefeuille = (Valorisation du portefeuille – Prix d’achat des cryptomonnaies)/Valorisation du portefeuille :   
    (9 000 + 8 000 – 5 000 – 10 000)/(9 000 + 8 000) = 11,76 % 
  • Calcul de la plus-value imposable pour la cession réalisée = Montant de la vente de cryptomonnaie réalisée * Plus-value globale du portefeuille :   
    9 000€ * 11,76 % = 1 059 €

La plus-value de 1 059 €* devra être déclarée via le Cerfa n° 2086.

Notez que les cessions dont le montant annuel est inférieur à 305 € sont exonérées.

Il est important de rappeler, en toute bienveillance, que les actifs crypto sont fortement volatiles. Ainsi le bitcoin a perdu les deux tiers de sa valeur en 2022 avant d’en récupérer la moitié en ce trimestre 2023. La prudence est donc de mise !

La vente en viager est-elle valide si le propriétaire est en mauvaise santé ?

Le viager consiste à vendre un logement en échange d’une somme égale à une partie de la valeur totale du bien (le « bouquet ») et d’une rente viagère jusqu’au décès, à une date imprévisible.

Ce type de vente repose donc sur le principe de l’aléa : aucune des deux parties ne sait, au moment de la signature de l’acte, pour quel montant total le bien sera acquis puisque cela dépend de la date du décès du vendeur. De ce fait, l’absence d’aléa entraîne la nullité de la vente : c’est notamment le cas si le vendeur, malade au moment de la conclusion de l’acte, décède de cette maladie dans les 20 jours qui suivent.

Un récent arrêt de la Cour de cassation précise toutefois que, si le vendeur n’est pas notoirement condamné par la maladie lors de la signature de l’acte, l’aléa existe bel et bien.

Les faits

Le 19 octobre 2011, madame Z, alors âgée de 78 ans et souffrant de graves problèmes de santé, vend sa maison en viager à un proche. Elle décède d’une chute quelques mois plus tard, le 17 janvier 2012. Ses héritiers invoquent alors une absence d’aléa et assignent l’acheteur en nullité de la vente. En effet, lors de la conclusion de l’acte, celui-ci aurait eu connaissance de la santé fragile de madame Z et du fait qu’une issue fatale était à redouter à bref délai. Sachant cela et n’ayant versé à la venderesse qu’un bouquet de 50 000 € pour un bien immobilier estimé à 270 000 €, l’acheteur était sûr de réaliser une excellente affaire.

La réponse de la Cour

La Cour de cassation a retenu qu’aucun élément ne démontrait que le décès de madame Z. était inéluctable à brève échéance au moment de la vente. En effet, son état de santé se maintenait grâce aux soins médicaux dont elle bénéficiait à domicile. De plus, l’acheteur était dépourvu de connaissances médicales et ne savait pas que son espérance de vie était compromise. La Cour de cassation rappelle donc que l’aléa existe dès lors qu’au moment de la signature de l’acte les parties ne peuvent apprécier l’avantage qu’elles en retireront parce que celui-ci dépend d’un évènement incertain. La vente n’avait donc pas de raisons d’être annulée. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi des héritiers de madame Z.

Source : Cour de cassation – 18 janvier 2023 – Pourvoi n° 21-24.862 – Troisième chambre civile.

Quel lien entre le « rachat instantané » sur les contrats d’assurance vie et la collecte record du livret A ?

La collecte du Livret A et du Livret de développement durable continue de battre des records avec 8,17 Mrds € engrangés en février. Sur les deux premiers mois de l’année, ces livrets ont engrangé 19,39 Mrds €. L’encours total sur les deux produits atteint 529 Mrds €. Source : Caisse des dépôts.

À 3 % net d’impôt pour un capital instantanément disponible, ces livrets réglementés sont de sérieux concurrents pour les fonds euros des contrats d’assurance vie dont le rendement moyen est de 2 % imposables. En 2022, les fonds euros ont connu une décollecte nette de 29,8 Mrds €. Cette décollecte a été compensée par la croissance des unités de comptes qui a mené à une collecte nette totale positive de 8 Mrds €. Source : APCR

C’est sans doute ce contexte qui a motivé Spirica du groupe Crédit Agricole à lancer les rachats instantanés. Ce nouveau service en ligne permet aux clients de recevoir en quelques clics une partie de leur épargne investie sur leurs contrats d’assurance vie via par un virement instantané – dans la limite de 20 000 € par opération.

Le service est proposé, sous conditions d’éligibilité, aux clients qui ont accès aux opérations en ligne. En effet, c’est l’automatisation de bout en bout, y compris l’automatisation des obligations réglementaires, qui rend cette innovation possible. Le service gomme ainsi une des lourdeurs de l’assurance vie. Nous pensons que les clients l’apprécieront et qu’il se généralisera.

Quelle fiscalité pour le défraiement des indemnités des élus locaux ?

Une catégorie de revenus bien spécifique est celle des indemnités des élus locaux. Les maires, conseillers municipaux, conseillers régionaux et conseillers départementaux sont plus de 520 000 en France, d’où l’importance de connaître les rouages de leur fiscalité.

Leurs indemnités bénéficient notamment d’un abattement sur-mesure : la fraction représentative des frais d’emploi, dite FRFE. Celle-ci varie de 661 € à 1 507 € par mois ouvré comme élu, selon le nombre d’habitants et le nombre de mandats de l’élu.

Si l’élu local dispose de plusieurs mandats, cet abattement devra être proratisé entre toutes ses indemnités. D’ailleurs, il arrive souvent que la FRFE couvre entièrement l’indemnité, voire la dépasse. Dans ce cas, il n’est pas possible pour l’élu local de reporter la part non utilisée.

Aussi, l’élu local ne pourra pas cumuler la FRFE avec la déduction des frais réels ou l’abattement forfaitaire de 10 %. Pour autant, il pourra bénéficier de la FRFE pour ses indemnités en qualité d’élus, et des frais réels ou de l’abattement forfaitaire pour ses salaires.

Source : www.amf.asso.fr

Déclaration de l’IFI : qui, quoi, comment, combien ?

Quand déclarer ? Lorsque le patrimoine immobilier net taxable dépasse 1,3 million d’euros au 1er janvier 2023 (d’après sa valeur vénale), une déclaration fiscale est à remplir pour les personnes domiciliées en France (formulaire 2042 -IFI).

Quelle assiette taxable ? L’évaluation de cette assiette s’effectue à l’échelle de chaque foyer fiscal, y compris dans le cas du concubinage. Elle prend également en compte les actifs immobiliers situés en France comme ceux situés à l’étranger (sauf convention internationale contraire). Par ailleurs, les biens immobiliers détenus par les enfants mineurs et dont le contribuable a l’administration légale entrent dans son assiette taxable de l’IFI.

Quels sont les biens concernés ? Les biens bâtis ou non bâtis qui ne remplissent pas les conditions pour être considérés comme des biens professionnels, ceux-ci étant exonérés d’IFI.

Qui doit déclarer ? Tout plein propriétaire ou usufruitier doit déclarer à l’IFI. Les nus-propriétaires n’ont pas à déclarer, car c’est à l’usufruitier de déclarer la valeur des biens en pleine propriété.

Quid de la détention indirecte ? Les parts de sociétés entrent de plein droit dans l’assiette taxable de l’IFI à proportion de leur part immobilière.

Quels abattements s’appliquent ? L’Administration fiscale autorise les contribuables à diminuer l’assiette taxable de l’IFI en appliquant des abattements parmi les suivants : de 30 % au titre de la résidence principale ; de 10 % à 40 % pour les biens immobiliers donnés en location ; et 75 % pour bois et forêts et parts de GFA et pour biens agricoles données en bail à long terme et les parts de GFA à concurrence de 101 897 €.

Le passif est-il à déduire ? Oui, les dettes afférentes aux biens taxables à l’IFI viennent en déduction de l’assiette taxable. Attention, toutefois, la déduction est plafonnée lorsque le patrimoine taxable dépasse 5 millions d’euros.

Les échéances de la déclaration de revenus 2023

Les échéances de la déclaration de revenus 2023 se rapprochent à grands pas. Voici les dates limites :

  • 13 avril : ouverture du service de déclaration d’impôt 2023.
  • 22 mai : date limite de déclaration de revenus au format papier
  • 25 mai : date limite de déclaration de revenus en ligne pour les départements 1 à 19 et les non-résidents
  • 1er juin : date limite de déclaration de revenus en ligne pour les départements 20 à 54
  • 8 juin : date limite de déclaration de revenus en ligne pour les départements 55 à 976

À noter

  • La déclaration de l’IFI est due en même temps que la déclaration de revenus.
  • Ne pas oublier la nouvelle déclaration des biens immobiliers, dont la date limite est le 30 juin 2023.

En savoir plus

Les auteurs Mathilde Bertrand, Thérèse Torris, Romin PRIEUR et toute l’équipe de LaBienveillanceFinancière espèrent que vous avez apprécié cette revue d’actualité. N’hésitez pas à nous faire part de vos commentaires ci-dessous.

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