Actualité patrimoniale LBF – Avril 2025

Actualité patrimoniale LBF – Avril 2025

Le défaut de conseil patrimonial peut coûter cher. C’est ce que démontrent une fois de plus les sujets d’actualité qui ont retenu l’attention des ingénieurs patrimoniaux de LaBienveillanceFinancière : la clause de substitution lors d’une vente immobilière ; la renonciation à la qualité d’associé d’un conjoint ; le PAS dans le couple ; la validité de l’ouverture d’un PEA et l’action paulienne contre les mauvais payeurs.


10 minutes de lecture

En cette période de travail intense à l’approche des déclarations de revenus, les ingénieurs patrimoniaux de LaBienveillanceFinancière partagent les sujets qui ont retenu leur attention.

Vente immobilière : gare à la clause de substitution !

Lors de la signature d’un compromis de vente immobilière, il arrive fréquemment que l’acheteur demande l’insertion d’une clause de substitution lui permettant de substituer un autre acheteur, par exemple une SCI, à la signature de l’acte de vente.

Or, pour fréquente que soit cette clause, elle comporte des risques pour le vendeur. Le Centre notarial d’assistance fiscale (CNAF) nous le rappelle à l’aide d’un cas particulièrement frappant.

La substitution de l’acquéreur

Un propriétaire, Mr X signe avec Mme Y un compromis de vente de sa résidence principale pour 1 million €. Le compromis prévoit que :

  • Mr X est exonéré de l’impôt sur la plus-value du bien au titre de résidence principale (’article 150 U II-1° du Code général des impôts (CGI)).
  • Mme Y pourra user d’une clause de substitution

Dans l’acte définitif, Mme Y ayant usé de son droit de substitution, les acheteurs du bien sont :

  • Mme Y pour la nue-propriété valorisée à 250 000 €,
  • La SARL Z pour un usufruit temporaire de 25 ans, valorisé à 750 000 €.

L’acte prévoit toujours que le vendeur Mr X sera exonéré de plus-value.

Double peine pour le vendeur

L’administration fiscale a remis en cause l’exonération du vendeur.

En effet, la cession d’usufruit temporaire n’est pas imposable au même titre que les plus-values immobilières.  L’article 13-5-1° du CGI prévoit que le produit de la cession d’un usufruit temporaire est imposable au nom du cédant dans la catégorie de revenus à laquelle se rattache le bénéfice ou revenu procuré par cet usufruit.

En clair, à cause de la substitution, Mr X est devenu vendeur d’un usufruit temporaire d’une valeur de 750 000 €. Il est donc imposable pour ce montant dans la catégorie des revenus à laquelle se rattache l’activité de l’acquéreur ! Il peut s’agir des revenus fonciers, des bénéfices Industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux, etc… Cerise sur le gâteau, il doit même s’acquitter pour ce montant élevé de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus !! 

Appel à la prudence

Clairement, la clause de substitution a ici profondément altéré la nature de la vente, ce qui aurait dû alerter le vendeur. Dans tous les cas, le vendeur doit s’assurer dès le compromis de la nature exacte des acquéreurs potentiels afin, éventuellement, de limiter les conditions de substitution et d’évaluer les conséquences pour sa fiscalité.

Source : CNAF, 15 avril 2024

PAS : généralisation du taux individualisé pour les couples

Dans plus de trois quarts des couples, les revenus de l’homme sont supérieurs à ceux de la femme. En moyenne les salaires des femmes du secteur privé sont inférieurs de 22,2% à ceux des hommes.

Pourtant, le taux du prélèvement à la source (PAS) appliqué par défaut jusqu’à présent était le « taux foyer », calculé d’après la déclaration de revenu commune et identique pour les deux membres du couple. Pour obtenir un taux individualisé représentatif des revenus de chaque membre du couple, il fallait en faire la demande expresse.

A partir de septembre 2025, pour tous les couples mariés ou PACSés, les taux de PAS actualisés d’après la déclaration des revenus 2024 seront individualisés par défaut.

Les couples qui le désirent peuvent opter pour le maintien du taux foyer en cochant la case prévue à cet effet dans leur déclaration d’impôt ou dans la rubrique « gérer mon prélèvement à la source » de leur espace personnel.

Source : Service public, Cosmopolitan

Prouver la renonciation à la qualité d’associé d’un conjoint

Le conjoint d’un couple marié sous un régime de communauté a le droit de revendiquer la qualité d’associé pour la moitié des parts sociales d’une société lorsque l’époux.se a souscrit ou acquis ces parts (titres non négociables) au moyen de biens communs (art. 1832-2, al. 3 du Code civil).

Comme nous l’avons déjà évoqué en octobre, ce droit peut être source de litiges au moment de la séparation du couple.

Renonciation tacite ?

Ce fut à nouveau le cas dans cette affaire récemment jugée en Cour de cassation. En l’occurrence, les conjoints, Mme Y et Mr Z, avaient chacun séparément formé une société avec l’argent du couple. A l’approche de leur divorce, Mr Z avait revendiqué sa qualité d’associé de la société de Mme Y afin d’en consulter les comptes. Mme Y avait refusé en arguant que, par le simple fait d’avoir constitué sa propre société, Mr Z avait tacitement renoncé à revendiquer sa qualité d’associé de sa société à elle.

La Cour de cassation lui a donné tort.

Renonciation sans équivoque

La Cour a admis la possibilité d’une renonciation tacite. Cependant, elle a précisé que l’inaction ou le silence ne prouvent pas à eux seuls la volonté de renoncer. Elle a considéré que la renonciation tacite doit « résulter d’un comportement qui est, sans équivoque, incompatible avec le maintien du droit du conjoint de se voir reconnaître la qualité d’associé. »

En l’absence d’un tel comportement et en l’absence de toute clause dans les statuts de la société ou dans un accord familial y faisant obstacle, la qualité d’associé de Mr Y doit être reconnue.

Renonciation formelle

Il est nécessaire d’apporter des preuve solides, préférablement des écrits formels, pour établir la renonciation du conjoint à sa qualité d’associé, qu’elle soit tacite ou expresse.

Si c’est le cas, la renonciation ne sera révocable que par décision unanime des associés, comme dans l’affaire commentée en octobre.

Sources : Lefebvre-Dalloz avril 2025 , Cour de cassation Chambre commerciale, 12 mars 2025, 23-22.372

L’importance du 1er versement d’un PEA

De nombreux conseillers financiers suggèrent à leurs clients, à juste titre, d’ouvrir un PEA ou un PEA PME pour « prendre date ». En effet, l’antériorité du contrat conditionne l’avantage fiscal du PEA et du PEA-PME : l’exonération d’impôt sur le revenu des gains n’intervient qu’à partir de 5 ans après la date d’ouverture (articles R. 221-111 et 221-113-3 du Code monétaire et financier).

Cependant, un point crucial échappe parfois à l’attention des investisseurs : le délai ne court pas à partir de la signature du contrat mais bien à partir du 1er versement, et plus précisément à partir du premier versement sur le compte espèces du PEA. La plupart des banques exigent d’ailleurs ce versement à la signature.

Cette étape a manqué dans le cas d’un client dont le médiateur de l’AMF nous rapporte la mésaventure. Ce client se plaignait du fait que sa banque refusait d’activer un PEA-PME qu’il avait contracté 7 ans auparavant, mais n’avait jamais alimenté. De plus, une autre banque lui refusait le transfert de ce même compte. En réponse à ses plaintes, le médiateur a expliqué à ce client que n’ayant jamais alimenté son PEA-PME, il ne l’avait de facto jamais ouvert. Le client n’avait donc d’autre choix que d’en ouvrir un nouveau dont le délai courrait à partir du 1er versement.

Cette affaire peut paraître anecdotique mais le médiateur indique qu’il reçoit de nombreuses plaintes pour refus de transfert de PEA ou PEA-PME qui relèvent la même cause : l’absence de versements et donc des plans non proprement ouverts. Il y a donc des manquements au devoir d’information. On note d’ailleurs que la banque de ce client lui avait offert une compensation de 150 euros et 2 ans de gratuité de frais de carte bancaire.

Source : AMF : Journal de bord du médiateur

Action paulienne : l’appauvrissement du débiteur en question

L’action paulienne permet à un créancier de rendre inopposable un acte juridique fait par le débiteur pour s’appauvrir intentionnellement dans l’intention d’échapper à ses obligations (article 1341-2 du Code civil).

Nous avons déjà évoqué dans nos actualités de novembre passé une affaire qui a fait date dans la jurisprudence de fraude paulienne. En effet, les juges du droit ont estimé que le transfert d’un bien immobilier dans une SCI, bien que n’appauvrissant pas le débiteur, créait un obstacle et augmentait le risque d’échapper au règlement de la créance qui justifiait l’action paulienne.

Une autre affaire plus récente confirme que le créancier n’a pas à apporter la preuve de l’appauvrissement du débiteur pour justifier l’action paulienne. Dans cette affaire une société X, débitrice envers son comptable Mr Y, avait cédé son fonds de commerce à une autre société Z pour un prix normal. La société X avait été ensuite mise en liquidation.

La Cour d’appel avait débouté le comptable Mr Y de son action en arguant qu’il n’apportait pas la preuve de l’insolvabilité de la société X. La Cour de cassation a cassé ce jugement considérant que la loi ne prévoyait pas la nécessité de cette preuve d’appauvrissement. Elle a souligné que la cession du fonds de commerce caractérisait le préjudice du créancier en cela que, bien que n’appauvrissant pas la société X, elle remplaçait le bien par des fonds plus aisée à dissimuler.

Par ce jugement, la Cour de cassation souligne que ce n’est pas l’appauvrissement du débiteur mais bien son intention d’échapper à son créancier qui caractérisent la fraude. 

Sources : Cour de cassation, Pourvoi n° 23-20.836, Le Mag Juridique


Sema Ayne, ingénieur patrimonial à LaBienveillanceFinancière, a préparé cette revue de l’actualité patrimoniale.

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